Notre société se préoccupe de plus en plus des bêtes. Une équipe de chercheurs confirme cette tendance et tente d’en comprendre les enjeux. Interview à l’occasion de la Journée mondiale des animaux.
Pour le sociologue Emmanuel Gouabault, «on est passés d’un anthropocentrisme à un zoocentrisme, où l’animal est présenté avec les caractéristiques d’une personne. D’où les mouvements de libération des animaux.»
Pas folle, elle est en ce moment dans une réserve près de Madrid. Il y fait plus chaud qu’ici. Peut-être y passera-t-elle son hivernage. Qui ça, elle? Max la cigogne, pardi! Dont on peut suivre les pérégrinations sur internet puisqu’elle est équipée d’une balise Argos. L’ourson Knut, du zoo de Berlin, a lui aussi déchaîné les passions. Sans oublier les chiens dangereux, les vaches devenues folles, les volatiles atteints de la grippe ou les ovins à la langue bleue.
Les animaux ont véritablement envahi notre espace médiatique. Même les politiciens s’y sont mis, en traitant avec une célérité surprenante du problème des peaux de chats. Au point qu’on se demande si la Journée mondiale des animaux, aujourd’hui, a encore une raison d’être.
Cette (omni) présence est-elle représentative d’un changement dans notre rapport à l’animal? C’est la question sur laquelle planche une équipe de sociologues de l’Université de Genève. Sur mandat de l’Office vétérinaire fédéral, ils épluchent la représentation dans les médias des bêtes à poil et à plumes, et ce de 1978 à nos jours. Après 4300 articles et 260 extraits de journaux télévisés analysés dans les trois langues nationales, le point avec le chercheur Emmanuel Gouabault.
– Notre rapport à l’animal a-t-il changé?
– Oui, et l’on peut identifier trois moments importants. Au XIXe siècle, avec l’urbanisation, la société s’est coupée de la nature, puisqu’on crée des espaces où cette dernière est extrêmement contrôlée. Un fossé se crée entre les animaux de compagnie, qu’on bichonne, et les animaux de rente, utilitaires pour leur viande ou les expériences. Un deuxième tournant se marque dans la deuxième moitié du XXe siècle, où l’on commence à s’intéresser beaucoup plus au sort des animaux de rente. Et depuis une dizaine d’années environ, émerge l’idée selon laquelle la nature n’est pas si gentille mais s’accompagne de risques, comme la grippe aviaire par exemple.
– Les animaux sont-ils vraiment plus présents dans les médias depuis les années 1970?
– Environ deux fois plus. Mais ce qui est important, c’est qu’on constate que deux catégories focalisent l’attention. Les animaux montrés (comme Knut ou Max) et les indésirables (comme les chiens dangereux ou les vecteurs de maladies). On en parle quand il y a des crises, mais globalement l’animal est plutôt un «sujet d’été», où l’actualité est plus calme. Un exemple: les cas de Suisses qui mangeaient du chat ou du chien présentés l’été passé.
– Manger du chat ou du chien, c’est culturel…
– De plus, il y a l’idée que le barbare, c’est toujours l’autre – les Asiatiques ou les Suisses allemands, pour les cas cités l’été passé. Et cela réactive le fantasme du cannibalisme, puisqu’on considère nos animaux domestiques un peu comme nos enfants.
– Est-ce que se dessine dans la société un mouvement général vers l’animal?
– On est passés d’un anthropocentrisme à un zoocentrisme, où l’animal est présenté avec les caractéristiques d’une personne. D’où les mouvements de libération des animaux. La frontière avec l’être humain est remise en question. Surtout qu’avec la grippe aviaire ou la vache folle, nous pouvons attraper leurs maladies. Dans les cas extrêmes, des gens sont prêts à tuer des êtres humains pour sauver des bêtes. C’est une forme d’écoterrorisme.
– Est-ce que la Journée des animaux est encore nécessaire?
– En tant que sociologue, je n’ai pas à me prononcer. Mais à titre personnel, je pense que la relation aux animaux est loin d’être claire et évidente et qu’on a donc besoin de travailler là-dessus. Une telle journée permet sûrement des rencontres et de former des projets.
Pratique: cours public, forum de recherche «La frontière homme-animal: un enjeu de société», les jeudis de 12 h 15 à 14 h, Université de Genève. Jusqu’au 18 décembre.
Source:animauxmedias-.24heures.ch
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