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Deux médecins condamnés à de la prison ferme pour une faute médicale. C’est le jugement inhabituel rendu ce mercredi par le tribunal correctionnel de Clermont-Ferrand, rapporté par La Montagne. Le tribunal est allé bien au delà des réquisitions du procureur. Il faut dire que cette affaire traduit une incurie, qui a de quoi faire frémir.
Le 31 juillet 2004, Patrice Canonne, un ouvrier de 40 ans, était occupé à poser un revêtement dans la piscine de rééducation de la clinique Saint-Odilon de Moulins. Un travail très dangereux : il faut manier un chalumeau avec de la colle à proximité. Le tout s’est enflammé, une véritable explosion, et le salarié a été grièvement brûlé.
Le salarié, atteint aux jambes, aux bras et au visage, a été conduit auprès du docteur Jean-Paul Briat, un chirurgien digestif, par ailleurs directeur de la clinique. D’après lui, le salarié ne voulait pas être admis à l’hôpital : « Il était debout quand je l'ai vu. Il a refusé d'être emmené à l'hôpital. Alors, comme il souffrait terriblement, je lui ai donné de la morphine. Pour le reste, j'ai appelé mon collègue ». La suite a été l’affaire du Docteur Philippe Dumontier, chirurgien orthopédiste : « J'ai d'abord refusé, car ce n'est pas mon domaine. Mais le Docteur Briat a insisté ». L'orthopédiste a prescrit des pansements et une hydratation par perfusion.
Très insuffisant. Les deux médecins avaient estimé la surface de peau brûlée à 20-25 %. Pas d’accord, ont répondu les experts. La surface touchée était de 45 %, et quoiqu’il en soit, la règle est qu’à 15 %, la régel est l’admission dans un service spécialisé pour le traitement aux grands brûlés. Les experts sont affirmatifs : « Tout médecin le sait. S'il avait été pris en charge aux grands brûlés, il avait 55 % de chances de survie ».
La famille exprime son inquiétude alors que le patient respire mal, ne peut plus se lever, et que la température atteint jusqu'à 41°, mais c’est pour entendre de la part des infirmières : « La fièvre, c'est normal, faut qu'il pisse sa morphine… » Au cours de l'audience, le Docteur Briat a reconnu être passé à coté de la question : « Je lui disais bonjour en passant le matin. On a sans doute eu un défaut de coordination ».
Cinq jours d’agonie. Quand l’état s’est avéré désespéré, le patient a été adressé au service des urgences de l'hôpital de Moulins, et les praticiens ont découvert un tableau apocalyptique : « Une odeur nauséabonde s'est dégagée d'un pansement. C'était verdâtre sous un autre ». Il était déjà trop tard : Patrice Canonne décèdera le 4 août 2004, laissant une veuve et quatre filles de 4 à 11 ans.
Etaient poursuivis devant le tribunal correctionnel les deux médecins, la clinique en tant que personne morale, et l’employeur pour les mauvaises conditions de travail.
Ce mercredi, l’employeur a été condamné à 10.000 euros d'amende, et la clinique à 20.000 euros d'amende. Contre les médecins, le procureur avait requis un an d’emprisonnement avec sursis et 20.000 euros d'amende. Le tribunal s’est montré beaucoup plus sévère : trois ans de prison, dont 18 mois avec sursis pour le Docteur Jean-Paul Briat, et trois ans de prison dont deux ans avec sursis pour le Docteur Philippe Dumontier.
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