vendredi 26 juin 2009

Les OGM ni oui ni non!

source.


Après une longue bataille juridique de sept ans, une petite organisation environnementale sud-africaine a gagné une importante victoire constitutionnelle contre Monsanto, le géant multinational des produits chimiques agricoles et des semences.

Dans un jugement à la plus haute cour d’Afrique du Sud, la Cour constitutionnelle, ce mois, le juge Albie Sachs a annulé une précédente décision rendue par un juge de la Haute cour, selon laquelle Biowatch devait payer les frais judiciaires de Monsanto et du ministère de l’Agriculture.

Ce jugement suivait un nombre d’affaires juridiques qui ont démarré en 2002 lorsque Biowatch a lancé des poursuites judiciaires à la Haute cour, demandant l’accès aux informations sur les cultures génétiquement modifiées (GM) produites par Monsanto. Biowatch est une organisation à but non lucratif qui milite pour des pratiques agricoles durables.

"Bien que Biowatch ait gagné le procès, il a été ordonné que nous payions tous les frais judiciaires du ministère de l’Agriculture et de Monsanto. Cela nous aurait détruit si nous devions payer ces frais", a déclaré à IPS, Rose Williams, directrice de Biowatch.

Dans son jugement, Sachs a affirmé que "le litige d’intérêt public pourrait être compromis par une sanction financière sévère que les coûts des ordonnances imposeraient aux organisations intentant ces procès. La protection des droits environnementaux ne dépendra pas seulement de la diligence des agents de la fonction publique, mais de l’existence d’une société civile pleine de vitalité, prête à contester dans l’intérêt public".

Sachs a dit également que cette affaire est "une question de grand intérêt pour la profession juridique, le grand public, et les organismes préoccupés par le litige d’intérêt public".

Une Williams remplie de joie a répondu en disant que "la victoire devant la Cour constitutionnelle prouve que les droits constitutionnels des Sud-Africains sont en train d’être protégés. Nous croyons qu’il existe un nombre de risques de santé et environnementaux résultant de la technologie des OGM. Les informations sur ces risques doivent être rendues publiques".

Répondant par rapport au jugement de la Cour constitutionnelle, Monsanto a déclaré : "Monsanto respectera naturellement la décision de la cour".

Mariam Mayet, directrice du Centre africain pour la biosécurité, est inspirée par ce jugement de la Cour constitutionnelle parce qu’il "prouve que l’Etat de droit s’applique toujours". Ce centre est une organisation à but non lucratif de défense des droits, qui fournit une analyse sur la biosécurité, la bio-piraterie et l’ingénierie génétique en Afrique.

"Dans le domaine de la biosécurité, la sécurité des organismes génétiquement modifiés (OGM) est en discussion. Il n’y a aucun consensus que les produits GM sont sans risque", a confié Mayet à IPS.

"Il existe de grandes inquiétudes que les cultures GM puissent contaminer la biodiversité, entraîner des altérations dans la structure de l’ADN des produits agricoles et les remplacer en fin de compte. Monsanto a un monopole. Elle contrôle la production et la distribution des semences GM dans le monde.

"Et si vous utilisez les semences de Monsanto, vous devez acheter également leurs autres produits comme les herbicides et les pesticides. L’organisation est extrêmement agressive dans son lobbying vers des gouvernements provinciaux. C’est une entreprise puissante ayant beaucoup d’influence politique.

"En Afrique du Sud, le ministère de la Science et de la Technologie est favorable à la technologie des OGM parce que le ministère reçoit d’importantes sommes d’argent de sources étrangères qui sont versées dans la recherche des OGM.

"Les agriculteurs sont motivés par le profit et embrassent cette technologie parce qu’il existe des gains à court terme tels que l’augmentation du rendement des cultures qui les sauve des coûts du travail. Mais ils ignorent les impacts à long terme sur la santé et l’environnement", a ajouté Mayet.

En Afrique du Sud, 60 pour cent des cultures de maïs sont génétiquement modifiées. Mais au début de cette année, trois cultures hybrides de maïs blanc ont échoué en Afrique du Sud, touchant une zone de plus 82.000 hectares dans trois provinces. Sur 1.000 fermiers qui ont utilisé ces semences spécifiques, quelque 280 ont constaté qu’il n’y avait aucun développement du grain.

Dans un communiqué, Monsanto a affirmé qu’une recherche approfondie a prouvé que le problème était causé par une faible fécondation au laboratoire, des conditions météorologiques inappropriées et des pratiques agricoles incorrectes. Les fermiers qui ont connu des pertes ont été dédommagés par Monsanto.

Le débat mondial sur les OGM demeure houleux, avec un nombre de pays européens résistant aux OGM. Le président français, Nicolas Sarkozy, a interdit en 2007 la production des cultures GM et dans la même année, Monsanto a été condamnée à une amende de 15.000 euros par un tribunal français pour avoir mal orienté le public sur l’impact environnemental de leur herbicide appelé ‘Roundup’.

En Afrique du Sud, Monsanto a été forcée par l’Autorité sud-africaine des normes de la publicité à modifier les termes d’une annonce indiquant que les produits GM n’ont jamais causé un dommage quelconque.

Un nombre de chercheurs dans ce pays situé plus au sud de l’Afrique, estiment que les OGM pourraient avoir des avantages, mais qu’il faut plus de recherche. Dans son livre intitulé "Envahie : L’Invasion biologique de l’Afrique du Sud" (publié par Wits University Press), l’écrivain scientifique sud-africain, Léonie Joubert, écrit que la maîtrise des herbes étrangères qui gagnent du terrain est une affaire délicate.

L’utilisation fréquente de semences génétiquement modifiées est en train d’alimenter la propagation de souches d’herbes des cultures résistantes aux herbicides, qui rend la maîtrise de l’infestation même plus problématique.

Elle a déclaré à IPS : "Les OGM, malheureusement, sont devenus une question aussi polarisante qu’une puissance nucléaire, que je pense est contre-productive. Il existe un énorme potentiel pour que les OGM nous aident à nourrir les affamés du monde et à nous adapter aux changements climatiques.

"Mon problème, c’est qu’ils ne sont pas assez bien réglementés et leur introduction est essentiellement motivée par des intérêts commerciaux. Alors, vous avez tout un ensemble de trucs GM entrant dans le monde agricole et potentiellement dans l’environnement naturel alors qu’il se peut qu’ils n’ont pas été nécessairement bien testés, suffisamment pour la sécurité, par exemple que les cultures GM ne s’hybrideront pas avec des variétés indigènes, qu’elles ne deviendront pas couvertes de mauvaises herbes ou invasives elles-mêmes.

"Les OGM doivent être traités sur une base de cas par cas, non pas un rejet global donné ou une acceptation globale donnée", a conclu Joubert.

Mélodie McGeoch, un membre de l’équipe principale du Centre pour la biologie invasive, un centre de recherche affilié à l’Université de Stellenbosch, près du Cap, était d’accord : "Il est important que nous augmentions le profil des risques environnementaux et écologiques potentiels de la biotechnologie. La biotechnologie peut être sans danger, mais nous devons assurer qu’elle est suffisamment testée et étudiée.

"Des mesures ont été prises pour éviter des risques éventuels, mais nous ne sommes pas encore là. Beaucoup d’organismes génétiquement modifiés sont libérés avant que des systèmes suffisants ne soient en place pour évaluer leur sécurité".

Selon Williams de Biowatch, les gènes des herbicides et des pesticides utilisés dans les cultures GM peuvent potentiellement avoir aussi des effets nocifs sur les êtres humains et les animaux. Biowatch souligne que l’Afrique du Sud a la réputation douteuse d’être le premier pays au monde à développer une culture de base génétiquement modifiée – le maïs blanc – commercialement.

Les consommateurs veulent savoir pourquoi cela a été approuvé, en quoi le fait de manger ce maïs affecte leur santé et pourquoi ils ne sont pas en mesure d’exercer leur droit de choisir des aliments non-GM à travers l’étiquetage des produits alimentaires. Williams soutient que les informations qui sont rendues publiques ne sont pas suffisantes. (FIN/2009)





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