Les Romains ne nous ont pas apporté que les routes, les aqueducs et les discours de Cicéron, ils ont aussi diminué notre résistance naturelle au virus VIH responsable du sida. C’est la conclusion à laquelle est parvenue une équipe de biomathématiciens du LATP-CNRS de Marseille qui publiera prochainement ses résultats dans la revue scientifique «Infection, Genetics and Evolution».
CCR5 muté, VIH entravé
Plusieurs études ont déjà montré qu’une mutation particulière du gène CCR5 procure une meilleure résistance au virus VIH. Même si cette protection n’est pas absolue, la présence de cette mutation (CCR5-delta32) diminue le risque d’être infecté et ralentit la progression de la maladie.
L’analyse de la répartition géographique de CCR5-delta32, a par ailleurs mis en évidence que cet allèle est assez fréquent dans le nord de l’Europe et de plus en plus rare quand on descend vers le sud. Ainsi, plus de 15% des Baltes et des Scandinaves en sont porteurs, contre 12,3% des Bretons et à peine 3% des Corses.
L’ombre de l’Empire
Selon Eric Faure et Manuela Royer-Carenzi, cette répartition reflèterait en fait celle de la conquête romaine. En effet, en analysant l’ADN de 19.000 Européens, les deux chercheurs ont pu vérifier que les régions européennes où la fréquence de CCR5-delta32 est la plus faible sont celles qui ont été contrôlées par l’Empire romain; plus on s’éloigne du limes, plus l’allèle devient fréquent.
«Les travaux sur l'ADN fossile de l'âge du bronze et du néolithique indiquent que la fréquence de l'allèle muté CCR5 était très élevé dans les populations européennes, probablement supérieur à 10%», précise Eric Faure à 20minutes.fr «Le gradient actuel de fréquence pourrait s'expliquer par un changement de la fréquence ancestrale à partir du sud dû à l’extension de l’Empire romain.» Bref, il semble que la présence des Romains a éradiqué une protection ancestrale (mais à l’époque inutile) contre le sida.
Protection ancestrale
Selon Faure, ce phénomène n’est pas dû à un génocide ou à une colonisation intensive pratiquée par les Romains. «Les flux de gènes en provenance des Romains ont été négligeables, donc l'effet était indirect.» Le chercheur pense plutôt que les légions et les colons romains ont apporté avec eux des agents infectieux dont la mutation CCR5-delta32 aggravait la virulence: l’allèle est devenu de plus en plus rare car les indigènes qui en étaient porteurs ont été décimés par les maladies véhiculées par les Romains. «En effet, on sait que si cette mutation protège du VIH, elle a un effet délétère chez les porteurs lors des infections par d'autres virus, notamment le West-Nile Virus.»
Source:
20Minutes.f
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