http://www.bulletins-electroniques.com/actualites/65014.htm
La capacité des arbres à absorber le dioxyde de carbone est bien connue et joue un rôle fondamental dans la lutte contre le changement climatique. Mais leur rôle ne s'arrête pas là : ils sont aussi capables d'absorber d'autres composés chimiques aériens. Les résultats d'une étude publiée le 21 octobre dernier dans la revue Science Express révèlent que les capacités d'absorption de la pollution atmosphérique par les forêts auraient été largement sous-estimées.
Les arbres, "nettoyeurs" de l'atmosphère
Menée par des scientifiques du Centre National pour la Recherche Atmosphérique (NCAR) à Boulder (Colorado), en collaboration avec des chercheurs de l'Université du Colorado du Nord et de l'Université d'Arizona, l'étude montre que les plantes à feuilles caduques absorbent au moins un tiers de polluants atmosphériques communs en plus que ce que les estimations précédentes indiquaient.
L'étude porte sur les interactions entre les arbres à feuilles caduques et les Composés Organiques Volatiles (COV) oxygénés [1], ces derniers ayant été jusqu'ici "mal représentés voire en partie négligés dans les modélisations [du climat]", d'après le chimiste de l'atmosphère Jos Lelieved, de l'Institut Max Planck pour la Chimie (Mainz, Allemagne). Ces composés ont des impacts à long terme sur l'environnement, intervenant dans la formation d'ozone et de gaz à effet de serre, ainsi que sur la santé humaine, étant considérés comme des composés cancérigènes ou mutagènes. Les COV tels que les NOx ou le benzène sont produits par la combustion d'hydrocarbures et par d'autres composés chimiques émis de sources naturelles et artificielles (transport, industrie...).
L'équipe de recherche a choisi de se concentrer sur des peupliers, dont le génome a été séquencé ce qui permet d'effectuer aisément des analyses génétiques. En mesurant l'absorption des COV oxygénés dans plusieurs écosystèmes, il a été découvert que les plantes caduques absorbent les composés à un taux élevé, jusqu'à 4 fois plus que les estimations précédentes. L'absorption est plus rapide dans les forêts denses et au niveau de la canopée [2], qui représente jusqu'à 97% des COV oxygénés capturés. L'étude montre aussi que lorsque les arbres sont soumis à un phénomène de stress (blessure physique, exposition à un polluant irritant...), leur taux d'absorption augmente de façon significative. "Les plantes nettoient notre air à un niveau plus important que nous le pensions" déclare Thomas Karl, un scientifique du NCAR et auteur principal de l'étude. "Elles consomment activement certains types de pollution".
Les scientifiques ont conclu que le mécanisme d'absorption des COV oxygénés s'inscrit dans un cycle métabolique plus large. En présence de polluants, les arbres augmentent la quantité d'enzyme nécessaire à la dégradation des composés en substances moins toxiques, tout en augmentant la quantité de COV oxygéné prélevée, ce qui a pour effet secondaire de "nettoyer" l'atmosphère. "Nos résultats montrent que les plantes peuvent adapter leur métabolisme et augmenter leur taux d'absorption de composés atmosphériques en réponse à plusieurs types de stress" déclare Chhandak Basu de l'Université du Colorado du Nord, co-auteur de l'étude.
Au final, à l'aide d'une modélisation informatique simulant la pollution atmosphérique mondiale, l'étude conclue que les plantes absorbent 36% de COV oxygénés de plus que ce que les études actuelles laissaient présager. De plus, cette consommation des COV oxygénés évite qu'ils ne se dégradent en aérosols dans l'atmosphère, lesquelles substances ont un impact important sur le climat et la santé humaine.
La panacée de l'aménagement urbain ?
A l'instar de cette étude, il existe une abondante littérature sur le rôle de la végétation et des arbres en particulier dans la régulation de la pollution atmosphérique. Si la recherche est surtout centrée sur le stockage et l'absorption du carbone, l'absorption d'autres polluants a aussi été étudiée [3], notamment dans un cadre urbain.
David Nowak [4], chef de projet à l'unité de recherche en Forêt Urbaine, Santé Humaine et Qualité Environnementale au sein du Service des Forêts, estime que les arbres de la ville de Chicago stockent l'équivalent de 716.000 tonnes de carbone évaluées à 14,8 millions de dollars - montant évalué à partir du prix du carburant automobile, et absorbent 25.000 tonnes de carbone par an, soit l'équivalent de 521.000 dollars. En plus du carbone, la canopée absorbe chaque année 888 tonnes de polluants atmosphériques, dont environ 325 tonnes d'ozone et 300 tonnes de particules mais aussi du monoxyde de carbone et du dioxyde de soufre et d'azote. Ce phénomène est évalué à 6.4 millions de dollars.
La présence d'arbres en milieu urbain est donc d'une réelle utilité non seulement dans de la lutte contre le changement climatique, mais aussi pour la réduction de la pollution urbaine. " [Les arbres] sont les [outils] urbains polyvalents par excellence" déclare Gary Moll, vice-président de l'organisation à but non lucratif American Forests, jouant le rôle de filtre, d'éponge, d'humidificateur, de puits de carbone et de protection contre le soleil et le vent.
La réalisation de cette performance dépend de nombreux facteurs, notamment de la taille des arbres mais surtout de leur disposition, l'efficacité de la consommation de polluants dépendant grandement de la surface couverte par leur canopée. Les espèces réagissant différemment selon les polluants auxquels elles sont exposées, il convient de les choisir avec attention afin de maximiser l'absorption des polluants et de minimiser les effets néfastes de leur assimilation. Néanmoins, implanter des arbres en milieu urbain est une solution efficace et peu coûteuse pour lutter contre la pollution.
L'intérêt dans ce domaine conduit Nowak à appeler les autorités à institutionnaliser la forêt urbaine comme "biotechnologie" au service de la qualité de l'environnement [5], et d'autres à considérer des projets d'arbres génétiquement modifiés pour décontaminer un site pollué ou traiter des polluants particulièrement dangereux ou persistants [6] [7]. La forêt n'a pas fini de nous surprendre...
Les arbres, "nettoyeurs" de l'atmosphère
Menée par des scientifiques du Centre National pour la Recherche Atmosphérique (NCAR) à Boulder (Colorado), en collaboration avec des chercheurs de l'Université du Colorado du Nord et de l'Université d'Arizona, l'étude montre que les plantes à feuilles caduques absorbent au moins un tiers de polluants atmosphériques communs en plus que ce que les estimations précédentes indiquaient.
L'étude porte sur les interactions entre les arbres à feuilles caduques et les Composés Organiques Volatiles (COV) oxygénés [1], ces derniers ayant été jusqu'ici "mal représentés voire en partie négligés dans les modélisations [du climat]", d'après le chimiste de l'atmosphère Jos Lelieved, de l'Institut Max Planck pour la Chimie (Mainz, Allemagne). Ces composés ont des impacts à long terme sur l'environnement, intervenant dans la formation d'ozone et de gaz à effet de serre, ainsi que sur la santé humaine, étant considérés comme des composés cancérigènes ou mutagènes. Les COV tels que les NOx ou le benzène sont produits par la combustion d'hydrocarbures et par d'autres composés chimiques émis de sources naturelles et artificielles (transport, industrie...).
L'équipe de recherche a choisi de se concentrer sur des peupliers, dont le génome a été séquencé ce qui permet d'effectuer aisément des analyses génétiques. En mesurant l'absorption des COV oxygénés dans plusieurs écosystèmes, il a été découvert que les plantes caduques absorbent les composés à un taux élevé, jusqu'à 4 fois plus que les estimations précédentes. L'absorption est plus rapide dans les forêts denses et au niveau de la canopée [2], qui représente jusqu'à 97% des COV oxygénés capturés. L'étude montre aussi que lorsque les arbres sont soumis à un phénomène de stress (blessure physique, exposition à un polluant irritant...), leur taux d'absorption augmente de façon significative. "Les plantes nettoient notre air à un niveau plus important que nous le pensions" déclare Thomas Karl, un scientifique du NCAR et auteur principal de l'étude. "Elles consomment activement certains types de pollution".
Les scientifiques ont conclu que le mécanisme d'absorption des COV oxygénés s'inscrit dans un cycle métabolique plus large. En présence de polluants, les arbres augmentent la quantité d'enzyme nécessaire à la dégradation des composés en substances moins toxiques, tout en augmentant la quantité de COV oxygéné prélevée, ce qui a pour effet secondaire de "nettoyer" l'atmosphère. "Nos résultats montrent que les plantes peuvent adapter leur métabolisme et augmenter leur taux d'absorption de composés atmosphériques en réponse à plusieurs types de stress" déclare Chhandak Basu de l'Université du Colorado du Nord, co-auteur de l'étude.
Au final, à l'aide d'une modélisation informatique simulant la pollution atmosphérique mondiale, l'étude conclue que les plantes absorbent 36% de COV oxygénés de plus que ce que les études actuelles laissaient présager. De plus, cette consommation des COV oxygénés évite qu'ils ne se dégradent en aérosols dans l'atmosphère, lesquelles substances ont un impact important sur le climat et la santé humaine.
La panacée de l'aménagement urbain ?
A l'instar de cette étude, il existe une abondante littérature sur le rôle de la végétation et des arbres en particulier dans la régulation de la pollution atmosphérique. Si la recherche est surtout centrée sur le stockage et l'absorption du carbone, l'absorption d'autres polluants a aussi été étudiée [3], notamment dans un cadre urbain.
David Nowak [4], chef de projet à l'unité de recherche en Forêt Urbaine, Santé Humaine et Qualité Environnementale au sein du Service des Forêts, estime que les arbres de la ville de Chicago stockent l'équivalent de 716.000 tonnes de carbone évaluées à 14,8 millions de dollars - montant évalué à partir du prix du carburant automobile, et absorbent 25.000 tonnes de carbone par an, soit l'équivalent de 521.000 dollars. En plus du carbone, la canopée absorbe chaque année 888 tonnes de polluants atmosphériques, dont environ 325 tonnes d'ozone et 300 tonnes de particules mais aussi du monoxyde de carbone et du dioxyde de soufre et d'azote. Ce phénomène est évalué à 6.4 millions de dollars.
La présence d'arbres en milieu urbain est donc d'une réelle utilité non seulement dans de la lutte contre le changement climatique, mais aussi pour la réduction de la pollution urbaine. " [Les arbres] sont les [outils] urbains polyvalents par excellence" déclare Gary Moll, vice-président de l'organisation à but non lucratif American Forests, jouant le rôle de filtre, d'éponge, d'humidificateur, de puits de carbone et de protection contre le soleil et le vent.
La réalisation de cette performance dépend de nombreux facteurs, notamment de la taille des arbres mais surtout de leur disposition, l'efficacité de la consommation de polluants dépendant grandement de la surface couverte par leur canopée. Les espèces réagissant différemment selon les polluants auxquels elles sont exposées, il convient de les choisir avec attention afin de maximiser l'absorption des polluants et de minimiser les effets néfastes de leur assimilation. Néanmoins, implanter des arbres en milieu urbain est une solution efficace et peu coûteuse pour lutter contre la pollution.
L'intérêt dans ce domaine conduit Nowak à appeler les autorités à institutionnaliser la forêt urbaine comme "biotechnologie" au service de la qualité de l'environnement [5], et d'autres à considérer des projets d'arbres génétiquement modifiés pour décontaminer un site pollué ou traiter des polluants particulièrement dangereux ou persistants [6] [7]. La forêt n'a pas fini de nous surprendre...
- [1] Article "Composé Organique Volatil" de Wikipédia :http://fr.wikipedia.org/wiki/Compos%C3%A9_organique_volatil
- [2] Article "Canopée" de Wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Canop%C3%A9e
- [3] BE Etats-Unis 141, "Les pluies acides donnent une volée de bois vert aux idées reçues", Agathe Dumas : http://www.bulletins-electroniques.com/actualites/56597.htm
- [4] Page de présentation de David Nowak : http://nrs.fs.fed.us/people/dnowak
- [5] Institutionalizing urban forestry as a "biotechnology" to improve environmental quality (David Nowak): http://redirectix.bulletins-electroniques.com/JHH7N(pdf)
- [6] Geo-engineered Artificial Forests to Capture CO2: http://redirectix.bulletins-electroniques.com/dPEpk
- [7] Introducing the Pollution-Eating Tree: Bioremediation Via Poplar At Hazardous Waste Site : http://redirectix.bulletins-electroniques.com/NQ3mA
- BE Etats-Unis 147, "Comme un arbre dans la ville...", Marc Magaud :http://www.bulletins-electroniques.com/actualites/57073.htm
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