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Dominique GARRAUD
La bascule de l'électorat irlandais est impressionnante. En juin 2008, la petite île membre de l'Union européenne depuis plus de vingt ans avait rejeté par référendum le Traité de Lisbonne à près de 55% des suffrages. Vendredi, ce sont plus de 67% des électeurs qui l'ont approuvé. Un «oui» franc et massif certes nourri par les promesses de l'Union européenne de respecter les spécificités irlandaises comme sa loi anti-avortement, sa neutralité militaire et une politique fiscale très favorable aux entreprises. Mais l'élément déterminant de ce revirement est lié aux effets de la crise financière à l'origine d'une chute de 8% du PIB irlandais cette année, avec la perspective d'une poursuite de la récession en 2010, et in fine la prise de conscience des effets amortisseurs dus à l'appartenance à l'Europe des 27. Du coup, le «Tigre celtique» champion toutes catégories de la croissance dans les années 90 (grâce entre autres aux aides européennes) a rentré ses griffes europhobes. Et aujourd'hui l'Europe peut dire: Vive la crise ! Le tsunami financier qui a ravagé ses économies s'est mué, à l'occasion du référendum irlandais en aubaine pour ses institutions politiques. La levée du verrou irlandais devrait permettre de vaincre les derniers obstacles à la mise en œuvre du Traité de Lisbonne. De mettre enfin sur les rails une Europe politique, plus démocratique, identifiable par un Président de l'Union et surtout par un super-ministre des Affaires étrangères doté d'un service diplomatique appelé à devenir le plus important du monde. Le conditionnel reste de rigueur à cause de la résistance des chefs d'Etats polonais et tchèque qui refusent encore de ratifier le Traité de Lisbonne. Le premier, Lech Kaczynski, a déjà fait savoir qu'un «oui» irlandais l'amènerait vers la ratification. Le second, Vaclav Klaus, est suspendu à la décision de Cour constitutionnelle tchèque devant laquelle il a introduit un recours. Et il compte sur une victoire des conservateurs britanniques europhobes lors des législatives du printemps prochain qui ont promis d'organiser un référendum pour annuler l'adhésion de la Grande-Bretagne au Traité de Lisbonne. L'exception britannique n'est pas une surprise. Son refus de l'Euro n'a jamais empêché l'Europe de fonctionner. Et peut-on sérieusement croire qu'un seul homme, Vaclav Klaus, puisse contre l'adhésion de son propre Parlement, stopper le train institutionnel européen ?
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