samedi 4 avril 2009

Des singes ouvriers

Les hommes apprirent à se servir d’outils au fil du temps. Les chimpanzés , observés dans leur milieu naturel, se dotent également d’objets qu’ils utilisent pour atteindre la nourriture convoitée. La nécessité étant mère de l’invention, ces primates laissent libre cours à leur génie créatif lorsque la faim les tenaille. Plus d’un outil réalisé par ces singes surprennent les observateurs de ces animaux étonnamment débrouillards.


Les termites demeurent hors d’atteinte des chimpanzés lorsque réfugiées dans leur abri souterrain. Des tiges d’herbe ou branches effilochées se glissent aisément dans ces termitières pour en ressortir enduites de ces insectes. Afin de se préserver de toute attaque d’un élément indésirable parmi les fourmis safari, ces primates substituent à l’outil initial une branche d’une longueur supérieure.

Pour apaiser leur soif en forêt, ces animaux fabriquent des éponges en usant de feuilles mâchées qu’ils incluent dans les troncs d’arbres attendant que s’y dépose l’eau de pluie. Les essaims d’abeilles se retrouvant au faîte des arbres, les chimpanzés doivent faire preuve d’encore plus d’imagination et de persévérance avant de déguster ce mets de prédilection, ajoutant parfois des leviers aux branches coupées en segments de différents longueurs, devant revenir à la charge des heures durant.

Ces observations nous parviennent suite à l’implantation de caméras dans un secteur d’un parc national d’Afrique reconnu pour la densité de la population de chimpanzés. La création d’outils diffère parfois selon la région. Ainsi, des chimpanzés, réduits à ne trouver en certains lieux que des noix, usèrent de matériaux plus résistants, préférant le bois où la pierre, selon la dureté des noix recueillies. Une sorte d’enclume, sur laquelle la noix repose, permet le bris de ce fruit sous les coups répétés de ces animaux déterminés. Des chimpanzés, habitant d’autres zones, ne développèrent pas cette technique. L’utilisation de l’outil chez ces primates date de 4000 ans. Ingénieux ces cousins!

Sources: News.bbc.co.uk, Ecofac.org




Vraisemblablement, mais faisons ensemble un bref survol des connaissances dans le domaine de l'utilisation des outils par les chimpanzés.

Jane Goodall a été le premier chercheur à pouvoir observer les chimpanzés sauvages fabriquer et utiliser des outils.

En 1963, elle a vu les chimpanzés au Parc National de Gombe, en Tanzanie, choisir des tiges d'herbe, ou des branches très fines, pour extraire les termites de leur abri souterrain en introduisant l'outil dans les sas d'entrée des termitières. Plus tard, elle a vu les chimpanzés utiliser des branches très longues pour "piéger" les fourmis safari, ou manyans, de loin afin d'éviter de se faire attaquer par le gros de la troupe.

L'université de Calgary (Canada) vient de publier dans les PNAS (Proceedings of the National Academy of Sciences) une étude sur l'utilisation de pierres par des chimpanzés il y a 4 3000 ans.
L'équipe d'archéologues dirigée par Julio Mercader a effectué des recherches sur 3 sites de la forêt de Taï. Il ont ainsi pu découvrir à dix mètres de profondeur, des pierres utilisées comme percuteurs. Une analyse approfondie a permit de déceler des restes d'amidon provenant de noix locales.

Elle a également pu observer les chimpanzés confectionner des "éponges", avec des feuilles mâchées, qu'ils utilisent pour absorber l'eau retenue dans les trous des troncs d'arbre ou, astucieux mais assez macabre, pour saisir les derniers lambeaux du cerveau dans les recoins du crânes du singe qu'ils avaient tué... pour ne rien laisser de ce met royal, un peu comme un fin gourmet dégustant un oursin...!

Dix ans plus tard, les premières descriptions d'outils en pierre, utilisés par les chimpanzés en Afrique de l'Ouest comme marteaux pour casser les noix très dures, ont été publiées, mais, il a fallu attendre l'étude de Christophe et Hedwig Boesch, sur les chimpanzés du Parc de Taï en Côte d'Ivoire, pour connaître tous les détails de ce comportement.

Les casseurs de noix :

Nous connaissons maintenant un peu mieux la "technologie" des chimpanzés sauvages. Les outils sont fabriqués par presque toutes les populations sauvages qui ont été étudiées mais, comme dans toutes les cultures, il existe des variations ou spéciations régionales.

Le comportement le mieux documenté est celui des chimpanzés casseurs de noix: les chimpanzés de l'Afrique de l'Ouest sont les seuls à maîtriser cette "technologie", qui a été pérennisée chez des chimpanzés en Côte d'Ivoire, Libéria et Guinée.

Les noix de nombreuses espèces d'arbres sont ainsi cassées, les plus fréquemment utilisées étant les noix de Panda oleosa, Coula edulis et Elaeis guineensis. Au Parc de Taï, les chimpanzés utilisent des pierres ou des morceaux de bois pour casser les noix de Coula, mais pour les noix de Panda, qui sont beaucoup plus dures, les pierres sont obligatoires.

La noix est posée sur une sorte d'enclume (une racine ou une pierre un peu creuse) et est frappée avec l'outil. En général, il faut plusieurs coups avant que l'enveloppe dure de la noix se brise. Les amandes des noix sont riches en protéines et en matières grasses; de fait, ces mêmes amandes sont très appréciées par les humains, lesquels utilisent parfois des techniques similaires pour les extraire.



En Afrique Centrale :

Peu d'études ont été réalisées sur les chimpanzés de l'Afrique Centrale, beaucoup moins que dans d'autres régions d'Afrique, mais l'utilisation des outils a été constatée partout où ils ont été étudiés plus longtemps que quelques mois. Les outils sont utilisés surtout pour attraper et manger, soit les insectes, soit leurs produits.

Les chimpanzés sont friands de fourmis et de termites, ces insectes apportent non seulement des protéines mais également certains acides aminés essentiels, qui se ne trouvent pas dans les végétaux. Mais, en général, les techniques employées par les chimpanzés d'Afrique Centrale diffèrent de celles utilisées ailleurs.

Des branches en bois solides sont utilisées, en premier lieu, pour creuser des trous dans les termitières ou les nids de fourmis et, une fois la brèche ouverte, les insectes sont saisis à l'aide de branches plus fines.

Les extrémités de ces branches ont la forme de pinceaux, les fibres sont séparées sur une longueur de un à trois centimètres, ce qui augmente l'efficacité de la cueillette des insectes. Jusqu'à présent nous ne sommes pas parvenus à savoir si les chimpanzés confectionnent délibérément ces "pinceaux", ou si les fibres se séparent au fur et à mesure de l'utilisation de l'outil.

A la Lopé :

Les chimpanzés à la Lopé, de même que les humains, adorent le miel et c'est pour s'en procurer qu'ils utilisent le plus souvent des outils. Les nids des abeilles se trouvent dans les trous des troncs d'arbres et les abeilles choisissent des sites difficilement accessibles.

Ce n'est pas facile de dérober du miel aux abeilles car les voleurs s'exposent à des attaques massives. Les chimpanzés fabriquent, avec des branches, de longs bâtons sur lesquels ils enlèvent toutes les feuilles et, parfois, également l'écorce.

Les outils utilisés pour recueillir le miel mesurent, en moyenne, 78 cm de longueur et les extrémités sont souvent en forme de pinceaux, comme les outils utilisés pour la capture des insectes.

Les chimpanzés peuvent avec ces outils s'approprier de bonnes quantités de miel et des fragments de rayon des nids, d'assez loin, sans s'approcher trop près de la ruche. Nous avons assez souvent observé les chimpanzés extorquer le miel aux abeilles, ils ne sont piqués que rarement.

Nous savons que lors de leurs travaux de recherches, Mike Fay et Richard Carroll ont constaté que les chimpanzés à la Réserve de Dzanga-Sangha en RCA utilisent des outils pour capturer et manger des termites.

Le Professeur Sabater Pi a publié les détails d'un comportement similaire chez les chimpanzés de Okorobiko en Guinée Équatoriale. Dans ces deux cas, les chimpanzés utilisent d'abord des branches solides pour ouvrir des trous dans les termitières et, ensuite, des branches plus fines pour "cueillir" les termites, technique comparable à celle utilisée au Gabon.


Canopée n° 2 - Avril 1994.

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1 commentaire:
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  1. Si on ne provoque pas leur disparition par notre incurie, quand il sera notre tour de disparaître du grand livre du vivant, la succession sera assurée, c'est sûr !
    Tinky :-)

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