Madagascar est un sanctuaire de la nature à plus d'un titre. Cette île, trois fois plus grande que la France, a été séparée de l'Inde et de l'Afrique il y a 160 millions d'années de cela, par la force de la tectonique des plaques. Elle en a conservé une géologie et des conditions climatiques particulièrement favorables au développement d'espèces végétales et animales diversifiées. Madagascar compte une large variété de flore et de faune endémiques et attise la curiosité des botanistes, ornithologues et zoologistes du monde entier.
Parmi les richesses naturelles de l'île, les orchidées figurent à la première place. Madagascar en possède en effet 1 200 espèces, pour la plupart endémiques, sur les 20 000 que compte toute la planète Terre. Habitée beaucoup plus récemment que les autres continents - les premiers migrants seraient arrivés vers le XIVème siècle - Madagascar a longtemps été préservée des conséquences de l'occupation humaine. Toutefois, des pratiques primitives comme la culture sur brûlis et la déforestation ont accéléré la destruction de la forêt primaire, habitat naturel de milliers d'espèces animales et végétales rares. Qualifiée autrefois d'île verte, Madagascar est aujourd'hui communément appelée île rouge car la quasi-totalité de sa couverture forestière a disparu pour laisser place à la savane, les steppes, la forêt secondaire et même - dans quelques régions du pays - le désert. Les orchidées ont dû s'adapter à ces conditions particulières et ont élaboré des stratégies de survie intelligentes dans un écosystème fragilisé. Elles mettent à contribution divers agents pollinisateurs pour perpétuer leur existence. Par exemple, la Leporella finbriata secrète une phéromone qui attire la fourmi Myrmeca mâle.
L'orchidée Satyrium produit quant à elle un nectar particulier dont le Soimanga - un petit oiseau exclusif à Madagascar - est particulièrement friand. Autre exemple, la Stanhopea graveolens attire les moucherons avec une odeur forte, les moucherons se font ensuite dévorer par les araignées qui, elles-mêmes, sont à la base de l'alimentation des petits oiseaux pollinisateurs. Développées depuis des siècles, ces pratiques ont encore cours même si l'Homme a aussi découvert des techniques permettant la reproduction à grande échelle de l'orchidée.
Trois de ces techniques sont particulièrement répandues dans le monde - y compris à Madagascar. Il y a d'abord la reproduction par division de la plante qui doit se pratiquer sur une plante assez grande et dotée d'au moins trois pseudobulbes - pour éviter que la plante mère ne perde son pouvoir reproducteur. Comme certaines orchidées ne refleurissent pas sur le même pseudobulbe, cette technique doit être maniée avec précaution. Elle est surtout réservée aux orchidées monopodiales comme la Vanda, la Vanille ou l'Arachnis dont la tige est coupée entre les racines aériennes, avec au moins trois racines laissées intactes par plante. La seconde technique consiste à laisser les plantes sans lumières pour que les boutons floraux se transforment en mini-plantes ou en pousses. Appelée reproduction par Keiki (bébé plante en hawaïen), cette technique se pratique par exemple sur les orchidées de type Phalaenopsis ou Dendrobium. Enfin, les orchidées peuvent aussi être cultivées par semis, même si cette approche est plutôt compliquée et nécessite une certaine expérience.
Il faut en effet procéder dans un milieu stérile constitué de gelée d'agar-agar et en utilisant des filaments de Rhyzoctonia, un champignon qui favorise la reproduction de la plante. Toutes ces techniques ont été développées dans le courant des années 1960, quand les scientifiques ont constaté la disparition de nombreuses espèces d'orchidées à Madagascar et ailleurs. Elles permettent de produire des plantes à une échelle presque industrielle, sans prélever des souches dans la nature. En effet, devant le péril auquel sont exposées les orchidées, leur cueillette est interdite partout dans le monde depuis les années 1970. Les nombreuses réserves naturelles et aires protégées de Madagascar contribuent à la préservation des orchidées de l'île, mais les moyens mis à la disposition des gardes forestiers sont parfois rudimentaires et inefficaces face aux populations locales et aux touristes malintentionnés qui n'hésitent pas à piller les forêts lors de leur passage. Le parc naturel de Ranomafana, où des centaines d'espèces d'orchidées telles que la Cymbidiella falcigera et l'Eulophiella roempleriana sont répertoriées, est un endroit à ne pas rater pour les passionnés de botanique. Il faut aussi visiter la partie nord-est de l'île - dans les régions de la Sava et de la Diana - qui est spécialisée dans la culture de la vanille dont Madagascar était autrefois le premier producteur mondial. La Vanilla madagascariensis est en effet l'un des piliers de l'économie malgache et sa culture avoisine avec celle de la Vanilla planifolia - une espèce importée. Bref, le destin de Madagascar est indissociable de celui des orchidées. Il ne reste qu'à espérer que le pays puisse protéger cette symbiose exceptionnelle sur le long terme.
Source:web-libre.org
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