M. Patenet (chef du GEIPAN) commente trans-en-provence.

- M. Bogdanoff (présentateur) : Je voudrais juste revenir sur Trans-en-Provence : qu’est-ce qu’il s’est exactement passé là bas ? C’est un des cas célèbres…

- M. Patenet (chef du GEIPAN) : Alors à Trans-en-Provence, c’est un cas effectivement célèbre, où quelqu’un qui travaillait dans son jardin, dans une cabane – il était en train de faire un peu de maçonnerie –, a entendu un sifflement. Et il a vu arriver un engin en forme de soucoupe d’en gros – bon les tailles ont été évaluées après – à peut-être 2-2,5 mètres de diamètre, qui s’est posé assez lourdement sur le sol et qui est reparti pratiquement dans les deux secondes qui ont suivies. Alors le témoin, sur le coup, c’était tellement bref qu’il s’est dit : "J’ai mal vu" ou "J’ai pas bien vu". Il s’est quand même approché et il a trouvé une trace au sol et donc il s’est dit : "J’ai pas rêvé, il s’est bien passé quelque chose". Il y a eu des prélèvements de terre de fait, des prélèvements de plantes qui étaient autour. On a pu estimer qu’il s’était posé quand même là un objet pesant, qu’il y avait probablement eu un échauffement du sol ; les plantes, les analyses biologiques ont montré qu’elles avaient subi une modification biologique… et puis voilà… je veux dire après ça, on en est là…

[…]

- M. Bogdanoff (présentateur) : Quelle est, selon vous, dans le faisceau des hypothèses, celles qui paraissent les plus crédibles ?

- M. Patenet (chef du GEIPAN) : Alors, il y a la fameuse hypothèse technologique. […]

- M. Bogdanoff (présentateur) : Votre prédécesseur, en fait Jean-Jacques Velasco, était lui un fervent défenseur d’une hypothèse qui paraît audacieuse, qui est l’hypothèse d’une provenance "externe"… extraterrestre. Quelle est votre opinion sur cette provenance ?

- M. Patenet (chef du GEIPAN) : Alors, nous n’avons pas aujourd’hui la moindre preuve que ces phénomènes proviennent d’une visite extraterrestre… mais on n’a pas non plus la preuve que ça l’est pas ! Donc l’hypothèse reste… reste ouverte. Elle est, je dirais, envisageable, elle est même pour certains raisonnable, ce que je crois aussi. […]



Voilà, en substance, ce qu’ont pu entendre les téléspectateurs qui étaient devant France 2 le 8 novembre dernier, dans la nouvelle émission d’Igor et Grichka Bogdanoff, "Science X". Le reportage, intitulé "les objets volants non identifiés face à la science", comprenait aussi des interventions de Jean-Jacques Velasco, l’ex-directeur du GE(I)PAN, de Jacques Krine, un ex-pilote de chasse dont le témoignage, inexploitable car à la fois très ancien (hors époque GEPAN), très tardif, très succinct et très vague (même l’azimut de l’objet allégué n’est pas connu), est pourtant devenu le nouveau cas à la mode chez les ufomanes français du simple fait du statut professionnel du témoin, de Denis Letty, un ex-général de l'armée de l'air impliqué dans le rapport Cometa, et de l’astronome Emmanuel Davoust, pour donner une coloration un peu plus scientifique à l’ensemble.

Je m’abstiendrais ici de commenter les prestations de MM. Velasco et Letty car leurs opinions et leurs biais de raisonnement sont connus et critiqués depuis longtemps. Celle de M. Patenet a constitué en revanche une mauvaise surprise. Non pas que nous nous attendions à quelque chose de vraiment nouveau, comme des analyses un peu fouillées ou des remises en cause lucides et courageuses – nous savons déjà à quoi nous en tenir sur le traitement du sujet ovni à la télévision, sur les frères Bogdanoff et sur l’actuel directeur du GEIPAN pour cela. Cependant, nous pensions sincèrement que l’évolution plutôt positive perceptible depuis environ un an dans le fonctionnement de ce service allait se traduire par une évolution similaire dans sa communication à destination du grand public. Or, le discours tenu par M. Patenet, dans cette émission, s’est révélé en réalité très similaire à celui dont nous a gratifié son prédécesseur durant une vingtaine d’années. Si l’on ajoute que "Science X", de par son style et son contenu, ressemble comme deux gouttes d’eau à "Temps X", on se serait presque cru retourné au début des années 80, lorsque M. Bounias présentait aux célèbres jumeaux les altérations biologiques vraiment très mystérieuses qu’il avait détecté à Trans-en-Provence…

Par rapport à cette époque, au moins une chose cependant a changé : les sources utilisées pour élaborer la Note Technique du GEPAN n°16, le seul document "officiel" disponible sur le cas de Trans-en-Provence jusqu’au début de cette année, ont enfin été rendues publiques : TRANS EN PROVENCE (83) 1981.

Nous sommes donc désormais en mesure de vérifier plus précisément sur quoi se basent réellement les déclarations des directeurs successifs du GE(I)PAN, sans que l’on oppose aux sceptiques l’argument qu’il existe certainement d’autres analyses non publiées qui autorisent ceux-ci à s’exprimer comme ils le font.

Dans cette optique, remarquons qu’aucune étude ne vient démontrer qu’un objet d’une masse comprise entre 500 ou 700 kg (ou de 3 tonnes, c’est selon) s’est posé sur le site, comme allégué par M. Velasco : tous les documents disponibles sur le cas étant censés avoir été mis en ligne, ce rapport scientifique qui étaierait ces dires a été soit accidentellement égaré, soit détruit, soit "emporté", soit il n’a jamais existé… En fait, M. Patenet n’est aucunement en mesure de prouver et donc d’affirmer qu’un objet "pesant" (sic) s’est bien posé à cet endroit.

Les documents disponibles en ligne démontrent que l’objet n'a pas pu laisser les traces invoquées à l’appui du témoignage. Un des laboratoires impliqués, le SNEAP, précise que l’échauffement superficiel du sol observé à cet endroit a été causé par frottement : "le frottement constaté et observé a eu pour conséquence de réaliser un effet thermique du sol superficiellement, le grès étant plus solide sous la partie noire qu’à côté" (SNEAP132R). Or, d’après le témoin, l’ovni qu’il prétend avoir observé n’était pas en rotation et ne s’est pas non plus déplacé sur le sol. Ce prétendu engin volant ne peut donc être à l’origine des traces striées en question, ni d'un frottement, ni de l'échauffement causé par ce frottement.

M. Patenet n’ignore pas non plus que le témoin a fait des aveux à peine voilés dans le passé et admis également que des véhicules automobiles avaient bien manœuvré à l’endroit des traces, dont l’aspect et la composition ne font que confirmer l’opinion émise d’emblée par les gendarmes intervenus les premiers sur les lieux : de simples ripages de pneumatiques… Avec un minimum de bon sens et de méthode, le GEPAN avait la possibilité, pour valider simplement cette hypothèse prosaïque, de reproduire des traces en tout point similaires sur un terrain similaire avec un véhicule automobile, comme a pu le faire le sceptique Eric Maillot.

Au minimum, M. Patenet aurait pu user du conditionnel dans son évocation du cas de Trans-en-Provence et, dans l'idéal, pu mettre en garde le public, en fin de son propos, sur le lien douteux entre la trace et l'ovni... Celui-ci n'a pas eu droit à ce minimum de recul scientifique.

Manifestement, les faits n’ont toujours pas réellement de prise sur les croyances des membres de ce petit service atypique du CNES. M. Patenet continue à cultiver la "mystérite" sur ce cas et à renverser allègrement la charge de la preuve ("on n’a pas non plus la preuve que ça l’est pas [extraterrestre] !") pour défendre, grâce à ce raisonnement anti-scientifique, la thèse extraterrestre.

Il existe certes des problèmes plus importants dans le monde mais depuis 1977, si l’on compte tout, l'équivalent de plusieurs millions d’euros d’argent public a tout de même été englouti dans ce service. Les citoyens et contribuables français mériteraient au minimum d’être objectivement informés en échange... source:scepticismescientifique.blogspot.com

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